Julia Blondeau

Ce texte date de 2014. ===⇒ voir http://www.juliablondeau.fr

Synthèse sonore et écriture

  • D’un premier abord, on a pu penser historiquement que la synthèse permettait, d’une certaine manière, la singularisation ultime ! Effectivement, nous partons d’un élément très primaire et à partir de cela, nous construisons une complexité qui, au bout de la chaîne, donne un son qui est le résultat de cette complexité, de l’organisation de cette complexité, donc une écriture profonde allant de l’inconscience auditive au plan le plus simple de l’écoute.

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  • Il y a en effet un grand potentiel de singularisation dans le travail de la synthèse. Cependant, les modèles de synthèse qui se sont affirmés avec les années et avec lesquels nous travaillons le plus souvent ne sont pas sans contraintes pour le compositeur. Ils engendrent de prime abord un certain type de morphologie, la structure du langage informatique pesant sur la définition du timbre. A chaque type de synthèse ses caractéristiques et petites contrariétés.
  • Le compositeur doit avancer avec toutes ces contraintes, qu’il peut cependant décider de considérer comme des atouts. La raideur de la synthèse additive peut par exemple être utilisée pour ce qu’elle apporte, notamment une présence très forte et très dynamique, sans compter ce que sa superposition à un son concret ou à un instrument donne comme richesse de contrastes, dans le cas de la musique mixte par exemple.
  • Il appartient donc au compositeur de venir "altérer" les algorithmes de référence, d’appliquer des modulations, de lier d’une certaine façon certains modules pour qu’ils soient contrôlés par d’autres, eux-mêmes connectés à d’autres modules de signaux…etc. Il s'agit alors de construire des architectures permettant une singularisation forte qui, si elles ne se détachent pas totalement des conventions liées au type de synthèse utilisé, essaient tout du moins de les transfigurer.

Démarches de recherche

  • Dans la continuité du travail sur les complexes simpliciaux et l'approche "programmation spatiale", je souhaiterais trouver de nouveaux moyens de contrôler et/ou de générer de la synthèse en utilisant des moyens "peu-conventionnel" qui, peut être, me permettront d'imaginer de nouvelles approches compositionnelles.
  • La notion de "systèmes dynamique à structure dynamique" (voir JL.Giavitto) me paraît extrêmement féconde, d'un point de vue compositionnel mais surtout dans le domaine de la synthèse. Je tenterai donc durant ce doctorat d'élaborer un certain nombre de parallèles avec cette notion et de réaliser quelques applications. (Voir aussi plus bas les premiers essais d'implémentation d'un système de Lindenmayer).

Une écriture de l'électronique

  • J'attache une importance particulière à l'écriture de l'électronique, pensant que son élaboration durant l'étape de composition a besoin d'un support équivalent à celui de la partition en musique instrumentale.
Interfaces "texte" : l'austérité au service de l'écriture ?
  • Il est souvent désagréable pour les compositeurs de travailler sur une interface texte. Il est vrai que nous sommes aujourd’hui habitués (et de plus en plus) aux interfaces très ergonomiques et "agréables à regarder" ! Les interfaces textes, à ce titre, font pâle figure. Mais leur intérêt réside bien ailleurs.
  • Pour des nécessités "d’écriture" et de besoins de créer des gestes très virtuoses faisant intervenir des timbres et des types de morphologies différents ou encore des lignes très précises et complexes dans lesquelles plusieurs paramètres varient en parallèle, l’interface texte s’avère être souvent salvatrice !
  • Les interfaces graphiques ont la fâcheuse tendance d'imposer une certaine "vue de l'outil" qui ne colle pas forcément aux nécessités compositionnelles. Je chercherai, pendant ce doctorat à trouver des moyens adéquats permettant une réelle écriture de l'électronique et une vraie singularisation sonore.
    • Exploration des bibliothèques Chroma et Prisma d'OpenMusic
    • Développement d'outils CSound couplé à un contrôle via le langage Python ou Max
    • Approches non-conventionnelles de certains outils
Du manuscrit à la sinusoïde...

Avant d'entrer en doctorat, j'ai développé quelques outils pour pouvoir facilement réaliser des partitions de synthèse en CSound à partir de mes partitions manuscrites. L'interface, réalisée en Max (affichage de la partition grâce à l'objet bach.score), envoie directement à CSound la partie "sco" dont il a besoin.

  • Exemple de transcription d'un extrait de partition manuscrite de la partie électronique de Soubresauts.

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Chelovek Na Storone
  • Chelovek Na Storone est une pièce électronique sur support dans laquelle j'ai adopté une démarche de travail bien particulière. En effet, après avoir créé quelques outils de synthèse pour savoir avec quels types de sons j'allais travailler, j'ai voulu essayer d’écrire la pièce, au moins en très grande partie, sur papier, de la même façon que pour la musique instrumentale.
  • Il ne s’agissait pas de se couper de "l’écoute" inhérente à la composition électroacoustique mais plutôt de chercher une écoute différente, parfois intérieure, qui soit guidée par les partis pris compositionnels. Il était nécessaire d’élaborer une écriture de l’électronique qui puisse générer des polyphonies complexes dans lesquelles chaque paramètre aurait une trajectoire qui lui soit particulière.
  • De ce point de vue, il me semblait indispensable de passer par la partition. Cette partition ne devait pas être une image du résultat sonore mais bien plus une partition de composition qui nous permettrait d’asseoir nos choix et de construire une complexité qu’il était difficile d’imaginer sans le médium de la partition.
  • Extrait de partition de Chelovek Na Storone


Essais sur des systèmes de Lindenmayer...

  • Je travaille actuellement à une modélisation d'un système de Lindenmayer pour contrôler des paramètres de synthèse. Encore très expérimentale, cette recherche a pour but d'arriver à un type de synthèse souple et "vivant" qui soit facilement contrôlable.

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Pour l'instant, le prototype n'est absolument pas dynamique. Je génère une suite de fréquences calculées à partir d'un système de Lindenmayer implémenté en Prolog puis lance des instructions via Max à un moteur audio CSound…

L'idéal serait bien évidemment d'avoir une version dynamique, avec laquelle on puisse changer fréquence et "champ de propagation". Je suis actuellement limitée par les logiciels avec lesquels je travaille qui ne sont pas des plus pratiques, notamment pour générer des oscillateurs dynamiquement.

  • Cette version a uniquement valeur de test, pour appréhender quels potentiels musicaux pourraient être tirés du dispositif.

Sonogramme de la version "prototype"… Il y a des trous dans le gruyère !

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blondeau/son.html.txt · Dernière modification: 2017/05/17 06:25 par Julia Blondeau